Revolution Girl Style Now!
Welcome! Ceci est un blog consacré à la culture rock au féminin. Je vous propose, chaque semaine, de partir à la découverte de nouveaux groupes, à travers des chroniques de disques et des live reports. Féministe et rock'n'roll, ce blog parle à coeur ouvert de filles qui font du rock, et qui le font bien. Et comme ce n'est pas tous les jours facile d'être une "rebel girl", je vous raconterais aussi un peu ma vie au sein de mon groupe Candy Flesh. Soyez au rendez vous!
N'hésitez pas à m'écrire, pour toutes suggestions ou commentaires.
Et les filles, envoyez moi vos disques! rebelgirldiary@gmail.com

lundi 9 août 2010

Nina Nastasia is a princess...(le secret le mieux gardé du folk US)



Il faut que je vous raconte comment je suis tombée amoureuse de Nina Nastasia. Je passais l'été en Californie, il y a déjà de cela quelques années, et j'avais entendu ce titre, "Superstar", incroyable ballade à la mélancolie nonchalante qu'aurait pu nous pondre Hope Sandoval. C'était en fait, une jeune songwriteuse new-yorkaise, discrète et délicate, au patronyme digne d'une héroïne de Dostoievski: Nina Nastasia. Vraiment emballée, je m'empressais de me procurer son album, à l'époque, "Run To Ruin", chez un disquaire de San Francisco. On avait loué une voiture, pour filer sur la côté, et je peux vous dire que "Run To Ruin" est passé en boucle dans notre autoradio cet été là… Depuis, malgré la tristesse hivernale de ce bel album de spleen lumineux, impossible pour moi de le détacher des images rayonnantes des côtes sauvages de Big Sur. C'est amusant de voir comme les disques peuvent faire l'effet d'une madeleine de Proust. Une note ou deux, et tout défile…

En rentrant à Paris, j'appris que cette incroyable songwriteuse avait déjà publié un premier album "Dogs" en 99, qui venait tout juste d'être réédité, après des années de pénuries. "Dogs" fut un vrai choc. Je ne me lasse pas de l'écouter encore et encore. Les morceaux si simples, si intimes, si délicats, de Nina Nastasia me touchent toujours autant. Sa voix, caressante et distante est un miracle qui fait fondre nos coeurs de pierre, sans ménagement.


"Dogs" est bien sûr son chef d'oeuvre, un classique instantané de folk intime, sauvage, et indépendant qui a redéfini tous les codes du genre, avec des morceaux aussi sublimes que "Stormy Weather", "Nobody Knew her", ou "The Long Walk", dignes des plus beaux moments de Joni Mitchell ou Karen Dalton. Produit par Steve Albini (grand admirateur de Nina, qui enregistre, depuis, tous ses albums), il lui concocta une atmosphère intime, chaleureuse et vibrante. Il n'y a pas de miel, pas de sucre dans le folk de Nina. Les morceaux, comme les paroles, sont réalistes, bruts, familiers, plein de coups et de blessures. De très belles comptines vaporeuses, faites de ronces et d'orties. Les violons crissent, la batterie rythme les battements de coeur incisifs de ces morceaux bucoliques. Nostalgie de l'enfance, fragments de vie, amoureuse délaissée, la voix sensible de Nina, sincère, envoûtante, tantôt enfantine, tantôt langoureuse, habite impétueusement "Dogs" de bout en bout, et Albini, grand magicien du son, parvient à nous faire croire, avec génie, que le groupe joue dans la pièce, en face de nous...

Après un début aussi flamboyant, difficile de faire mieux. Cependant, Nina a toujours tenté d'explorer de nouveaux horizons: plus country sur "The Blackened Air" (son second opus); plus sombre et orageux sur le sublime "Run To Ruin". Sur son quatrième album "On Leaving", Nina est revenu vers l'américana sensible et délicieux, qui fit le succès de "Dogs", de très grands morceaux donc, comme "Why Don't You Stay Home", "Counting Up Your Bones" ou "TreeHouse Song". qu'on avait déjà découvert sur les John Peel sessions (encore un grand fan de Nina). En 2007, Nina a fait carrément dans l'expérimental avec le très aride "You Follow Me", fruit de son travail avec le batteur Jim White (Dirty Three), les morceaux étaient toujours là, mais Jim White partait régulièrement un peu trop en live (batterie très rock, ou très jazzy, ou très à l'ouest, sur les folksongs mélancoliques de Nina, c'est assez déroutant).



Cette année, Nina revient avec "Outlaster", toujours enregistré par Steve Albini. Dès le début, on tombe sur le bouleversant "Cry Cry Baby", lui aussi découvert il y a quelques années sur les Peel Sessions. C'est assez incroyable que la belle n'ai pas pensé à l'enregistrer plus tôt. Sur les Peel Sessions, Nina jouait seule, guitare/voix, comme à la maison. Les morceaux magiques semblaient d'autant plus familiers...
Sur "Outlander", Nina a carrément embauché un orchestre de chambre. Sans pour autant tomber dans la grandiloquence, les morceaux sont transportés, élevés vers des cieux majestueux. Ces arrangements luxueux viennent illuminer le spleen miraculeux de la jeune songwriteuse. Car Nina, belle amoureuse inconsolable, n'a pas fini de nous surprendre et on trouve encore d'incroyables pépites folk gracieuses et poignantes telles que "You're a Holy Man", ou "You Can Take Your Time".
Digne héritière de Neil Young, Nina est une grande conteuse de l'Amérique, délicate et sauvage. La poésie libre et sensible de ses textes, fait souvent penser aux récits des vagabondages de Jack Kerouac (pas si loin de Big Sur…).Elle peint avec une grande délicatesse des destins brisés, des histoires d'amour qui finissent mal. Plus mis en scène, plus théâtral, elle explore, sur "Outlaster",de nouveaux horizons, lorgnant vers le cabaret ou le tango bizarroïde ( "This Familiar Way"), venu de l'est , ou même vers les fantômes celtique de Sandy Denny. Hanté par les sombres feux du passé, la musique de Nina Nastasia est intemporelle, sans compromis. A la fois angélique ("Outlster") et ensorcelante ("Wakes"), elle remet, avec une grande classe, toutes les petites folkeuses en herbe à leur place. Car chez Nina Nastasia, le folk est dangereux, aventureux, violent. Point de mièvreries, ni de chichi, ici, le terrain est miné, la mélancolie, latente et fascinante, sublimée par les arpèges de guitare aériens, délicats et la douce voix hantée de cette princesse de l'Amérique désabusée.

Moins connus que Cat Power ou Alela Diane, mais tout aussi importants (voir plus) les disques de Nina Nastasia sont des secrets intimes et bien gardés, que je vous invite à faire découvrir au plus grand nombre…

Ci dessous, la video de "Cry Cry Baby" :

jeudi 29 juillet 2010

Chronique Electric Pussies "Juste Manger": free noise expérimentale et barrée



Un doux vent de rock'n'roll soufflerait-il insidieusement sur la ville de Rennes? La jolie capitale de la Bretagne pourrait-elle bientôt devenir notre Seattle à nous? Après le bon rock indus salement grunge des Cute Kitten Eaters, c'est au tour de de la noise expérimentale d'Electric Pussies, de venir squatter ma platine. Mais la comparaison s'arrête là, même si le trio de riot grrl rennais partage quelques bonnes influences de la scène culte 90's (Babes In Toyland, Sonic Youth, entre autres) avec leurs compatriotes au patronyme félin, leurs univers sont tout de même assez éloignés.

Ici, on fait dans l'expérimental, l'improvisation, l'exploration des sons en tous genres. Libérés des codes ou des contraintes de la pop, Nush, Chaleur et woOtzee s'en donnent à coeur joie sur les huit titres noisy et expérimentaux qui composent leur premier Ep "Juste Manger". Tour à tour délirant ("Délivrance"), irritant ( "Oyev Oru") ou poignant ("You Say You"), les trois filles, armées d'une basse bien grungy, d'un synthé déglingué et d'une voix affolée, s'amusent à improviser des rythmiques dérangeantes, jouant avec des arrangements décalés, aidées par des instruments assez atypiques dans le rock (mandoline électrique, clarinette et objets en tous genre), ce qui confère à ces Electric Pussies, un son totalement inédit et plutôt intéressant. A l'instar des élucubrations de Frank Zappa, Captain Beefheart ou Can, les Electric Pussies ne font pas dans la dentelle. Ces filles là ne sont pas là pour flatter vos oreilles ou pour faire danser vos soirées pop. Leurs morceaux sont arides, secs, violents, parfois dérangeants voir insupportables. Pas le genre d'album à mettre en fond sonore d'un diner chic. Mais justement. En ces temps modernes, pâles, lisses, et décérébrés, on a vraiment besoin de groupes originaux et aventureux, qui nous emmènent ailleurs, plus loin, là où ça fait mal. Quand les repères rassurants de la pop classique s'éloignent, et laissent la place à un voyage sonore intriguant et inédit.

Les trois Pussies n'ont pas froid aux yeux. Le disque, qui tourne autour des folies décalées de la bassiste, s'ouvre en instrumental avec "Over You", dissonant, étonnant et hypnotique. La voix se pose ensuite, barrée et inquiétante. Puis de drôles de percussions viennent présenter "Oyev Oru", morceau à l'ouest, dérangeant, un peu irritant. Une cloche funèbre ouvre ensuite "You Say You", meilleur titre de l'Ep, plus construit, plus envoûtant. Sons de clarinette lugubre, chuchotements sensuels et désespérés. Puis le free style reprend de plus belle sur "Frout Frout", difficile à cerner, et "Division J.", bizarroïde hommage au groupe de Ian Curtis qui fait un peu mal à la tête. A ce moment là , je me sens bernée, j'ai l'impression que les filles m'ont un peu arnaqué avec leur beau packaging " free noise". En effet, dans ce style, la frontière entre un pur délire inaudible et un morceau intéressant, parce qu'il explore des registres inattendus, est mince. Heureusement, les Pussies reprennent la main sur "Just Wanna Eat", plus nerveux et délirant. Un petit côté Pj Harvey et des sons effroyables qui fusent dans tous les sens. Puis le délirant "Délivrance" et le final, "Zombie Panda", explore un peu plus leur fibre cinématographique dans un joyeux bordel haut en couleur.

Malgré quelques bémols, l'univers des Electric Pussies est complexe et captivant, si l'on veut bien se laisser embarquer par cette free noise sensuelle, au délire cinématographique, et laisser nos habitudes au vestiaire. En live, j'imagine que la vision de ces trois personnages atypiques et déjantés doit valoir le détour…En tout cas, dépaysement garantie à bord de "Juste Manger".

lundi 26 juillet 2010

Live Report Ruby Throat+John Parish@Batofar 20-07-10



Telle une sirène échouée sur un rivage inconnu, Katie Jane Garside débarque sur la petite scène du Batofar, fidèle à sa légende de diva évanescente, dérangeante et fascinante, l'air hagard, les yeux cernés, cachés sous de grosses lunettes de soleil, le teint blafard et vêtue d'une robe de cendrillon en haillon.



Accompagnée de son guitariste, l'excellent Chris Whittingham, la queen des Riot Grrrl (Queen Adreena, Daisy Chainsaw) vient nous ensorceler avec les très beaux morceaux d'équilibriste folk, intimes et envoûtants, de son side projet, le bien nommé Ruby Throat.



Assister à une prestation de Katie Jane Garside est toujours un moment unique et incroyablement troublant. Que ce soit dans Queen Adreena, où elle joue à merveille son rôle de poupée trash, violente, hallucinée, capable de tous les excès, provocante, répugnante, mais toujours d'une justesse affolante ou dans Ruby Throat, où elle ne martyrise plus son acolyte guitariste, mais tisse sa voix ,de larmes et de sang, dans les arpèges délicats de ce dernier, dans un grand moment de sensualité à fleur de peau, Katie Jane captive.



Comme une héroïne déchue de Lewis Carrol, elle se pose ici en petite fille troublante, Lolita vieillissante et hyper sexuée. Son interprétation est impeccable. Plus minimaliste que dans Queen Adreena, son jeu de scène est réduit à l'essentiel. Assise sagement sur une chaise, tiraillant nerveusement sa robe de baby doll souillée, elle titille son guitariste -cow boy ou fait onduler les courbes de son corps décharné, en équilibre sur ses talons aiguilles.



Jouant des limites de leur concept, le duo utilise à merveille les effets de boucle que soit dans la voix de cristal ou dans les arpèges de guitare, pour créer une atmosphère à la fois douce, hypnotique et violente, toujours tendue, sur le fil, comme en apesanteur. Les morceaux incroyables de l'album "The Ventriloquist" et "Out Of A Black Cloud Come A Bird", sont bien évidement sublimés par le charisme halluciné de cette diva hors pair, seule sur le ring, qui offre au public de grands moments artistiques visuels, sincères, entiers et intenses qui font vraiment du bien dans un univers rock bien trop policé. Repoussant les frontières du folk, post rock, dream pop ou de l'expérimental pure, Ruby Throat explose les codes du genre et ballade ses morceaux, sans pudeur, les émotions à vifs, à travers des visions oniriques, sensuelles et cinématographiques. Le final donne des frissons et laisse tout le monde K.O, lorsque le duo fait monter la pression, laissant s'enchaîner les boucles à l'infini, comme un grondement de tonnerre, violent, poignant, ou la bande son d'un cauchemar éveillé façon David Lynch. Une mise en scène musicale des névroses psychotiques et fascinantes de Katie Jane, intense, vibrant, sauvage et flamboyant.













On ne sort pas indemne d'un concert aussi saisissant, et c'est le souffle coupé qu'on accueille, dans un tout autre registre, John Parish et son groupe. Collaborateur de Pj Harvey, Eels, ou Giant Sand, John Parish, classe de gentleman british et jeu de gratte impeccable, propose ici un voyage à travers ses compositions pour le cinéma ("Rosie") et ses albums solos ("Once Upon a Little Time", "How Animals Move") et nous embarque dans un road movie à la "Paris, Texas" dans les vallées abruptes de l'americana, gorgés d'âme et de fantômes country. On pense bien sûr à Giant Sand ou Calexico dans cette façon de marier la pop et l'americana classieuse. C'est plein de guitares slide, de nappes de claviers et de choeurs féminin, ça donne envie de paresser sur un rocking-chair, au bord d'une route perdue…Langoureux et lancinants, John Parish et son groupe, malgré ses grandes qualités techniques, manquent, malgré tout, d'un peu de pêche et de présence. Homme de l'ombre, discret et élégant, John Parish et ses jolies compositions folk rock, mériteraient certainement un(e) interprète un brin plus charismatique, qui permettrait au groupe de prendre son envol et nous emporter plus loin dans les contrées brumeuses du folk rock américain (je repense alors à OP8, très beau disque d'americana hanté, fruit de la rencontre entre Giant Sand et Lisa Germano)...















Photos: Stéphane Dalle

mardi 20 juillet 2010

Live Report Holly Miranda+Chris Garneau@Nouveau Casino 19-07-10



C'est un Nouveau Casino bouillant et plein à craquer qui accueille religieusement Chris Garneau , jeune songwriter new-yorkais au français impeccable. Débutant le concert seul, armé de sa voix fragile, et de son clavier minimaliste, Chris Garneau, allure gracile et gueule d'ange, met immédiatement le public dans sa poche. On entend pas une mouche voler lors de ce set soigné, précieux et délicat. Le public semble médusé par le charisme androgyne de ce chérubin timide à la voix enfantine. Dans le style, (pop folk baroque tendance Elliot Smith/Antony and The Johnsons), Chris Garneau s'en sort d'ailleurs plutôt bien, le public parisien reste suspendu à ses lèvres et à ses silences, entre deux comptines tristes, frémissantes et élégantes. Puis un beau quintet de cordes et de cuivres s'installent, accompagnant la voix de funambule du jeune songwriter. Tout cela est très beau, propre, soigné, raffiné, mais, je l'avoue,un brin soporifique (je sais, je suis sans coeur). Même si on ne peut douter de la sincérité du beau songwriter, ni de la qualité très "indie" de ses morceaux, je me suis quand même surprise à penser par moment à autre chose…



Heureusement, Holly Miranda débarque pour me remettre les idées en place. Découverte grâce à "The Magician's Private Library", sorti cette année chez XL, et produit par David Sitek de TV On The Radio, un très bel album de dream pop évanescente et raffinée comme on n'en entend rarement de nos jours, qui nous renvoyait aux meilleures productions du label 4AD.



En live, la jolie Holly et son groupe se révèlent beaucoup plus rock, énergiques et secoués que sur disque (ce qui n'est pas pour me déplaire). Les morceaux sont joués plus vite, plus forts, transcendés par la présence délicate de la jeune new-yorkaise, originaire de Detroit. S'éloignant de l'influence dream pop très Cocteau Twins/ Mazzy Star, qui caractérise son album, Holly Miranda propose en live une cold wave électrique, teintée de pop vaporeuse, féminine et raffinée, pleine d'échos, de claviers, de voix et d'effets en tout genre. Sur disque, sa voix fait souvent penser à Chan Marshall. En live, elle virevolte, puissante, vibrante, capable autant de caresse que d'accès de rage désespéré. Un potentiel énorme qu'on ne soupçonnait pas tout à fait. Le batteur, à l'énergie communicative, sort un peu du lot, le bassiste et le guitariste soliste faisant bien leur job dans leur coin, discrets et efficaces.



Les morceaux ensorcellent: des ballades oniriques, des comptines lumineuses et endolories, la voix magique fait le reste. Du très beau "Waves" , en passant par" Forest Green Oh Forest Green" ou "Every Time I Go To Sleep", le public, sous le charme de cette artiste incroyable, mi fée- mi sorcière, en redemande et Holly revient pour un rappel qu'elle finira seule sur scène, dans un Halleluiah poignant et somptueux. Une très belle artiste, délicate et émouvante, qui n'a pas fini de faire parler d'elle...



















photos: Stéphane Dalle

vendredi 9 juillet 2010

Live Report Kiusa+ Shuunt @ Dame De Canton- 8 juillet 2010



C'est sur les quais de Seine, à bord de la Dame De Canton, que j'embarque, en ce début d'été parisien, pour découvrir en live, le groupe Kiusa , dont les titres originaux en écoute sur Myspace, m'avaient vraiment interpellé. Ce n'est, en effet, pas tous les jours que l'on découvre, avec plaisir, un groupe qui sort un peu des sentiers battus du paysage, plutôt morose, du rock actuel, en proposant des structures inédites et des morceaux vraiment originaux.

Et c'est une sacrée découverte que ce joli quintet parisien, singulier et atypique. Kiusa , c'est donc trois filles (guitare, basse, chant) et deux garçons ( guitare et batterie) et autant de possibilités. Dès le premier morceau, on est tout de suite happé par le charisme chaleureux de Flavia, superbe front woman qui nous embarque, avec ses acolytes, dans un voyage sonore totalement inédit. Rigolote, charmante, déjantée et touchante, cette chanteuse parvient, avec beaucoup d'allure et une bonne dose d'auto-dérision, à faire le grand écart entre Nina Hagen, Pj Harvey, Kate Pierson et Emliy Haines, en proposant des lignes de voix vraiment étonnantes et originales, soutenues en beauté, et avec classe, par Marie, jolie bassiste, au grain de voix charmeur. Le trio de filles, très justement mis en avant, fonctionne donc à merveille, laissant les trois personnalités, bien distinctes, s'exprimer chacune à leur façon. Le charme discret, sexy et élégant de Maloo, à la guitare, vient tempérer la présence extravertie de la chanteuse, tandis que Marie, à la basse, techniquement au dessus du lot, se pose en grande soeur gracieuse et bienveillante. Les garçons sont un peu en rentrait, même si le soliste vient souvent se chamailler avec la guitariste, le batteur manque malheureusement de présence et d'énergie.

Musicalement, ça joue. ça joue même très bien. Kiusa retourne la pop coquine dans tous les sens et la fait diablement bien danser avec un post punk garage nerveux. Jamais là où on les attend, les morceaux sont complexes, sinueux, prenants. La folie douce et une belle énergie se propagent tout au long du set, l'apothéose étant leur morceau dit "planant", assez incroyable, tout au long duquel Flavia sussure nerveusement "Just another day...", sans jamais relâcher la pression. Puis les rôles s'inversent, et les filles font tourner leurs instruments, pour un morceau ou deux. Juste le temps de laisser Marie, bassiste, empoigner une guitare acoustique et débuter une ballade folk touchante qui finira vite en rock n' roll enragé et fièvreux. A la fin du set, les filles (et garçons) osent même une reprise du sexy "Combat Baby" de Metric, un morceau qui leur va vraiment bien (peut être même un peu trop).

Difficile de coller une étiquette sur les morceaux entraînants de Kiusa, tant le groupe fait preuve, à chaque fois, d'une grande originalité, à mille lieux des conventions qui enferment le rock'n'roll dans des cases marketing depuis si longtemps. Voilà enfin un groupe qui se joue des codes du genre, avec élégance et humour. Ces trois filles là ont tout compris. La pop malicieuse, le post punk nerveux et violent, le rock indie cutlivé et précieux...Les Kiusa vous re-balancent tout ça, dans un bon concentré de folie et d'énergie sexy et impertinente.




















Beaucoup moins originaux, mais tout aussi efficaces, les Shuunt investissent ensuite la scène, en cette fin de chaude soirée. Trois garçons, une fille, (un peu moins de possibilités), les quatre Shuunt proposent une pop nerveuse et mélodique, parfaitement dans l'air du temps (Klaxons, Ghinzu, Franz Ferdinand), aux refrains ultra accrocheurs qui se retiennent en un éclair de seconde. Même si je ne raffole pas de ce genre de pop un peu raccoleuse, force est de reconnaître que les morceaux de Shuunt sont tout de même très bien fichus et sacrement efficace. Le chanteur, qui a assez de charisme et de sex appeal pour tenir la baraque, parvient même à apporter une pointe de lyrisme romantique dans cette pop bien convenue. Un très bon batteur, également, qui, ça se sent, en a sous le capot, et de bonnes idées aux claviers, qui apportent une touche electro rock qui leur va bien. Au final, un groupe plutôt agréable à regarder, pas inoubliable, mais franchement sympathique.

Prochain concert: le 27 août au Réservoir.










Photos: Stéphane Dalle

jeudi 1 juillet 2010

Live Report Bloodthirsty Hippies+ So Was The Sun+ Long John Silver @ Gambetta Club, 30 juin 2010




Dernier jour du mois de juin suffoquant. Rendez-vous au Gambetta, petit "club" à l'atmosphère singulière, à deux pas de la Flèche d'Or, pour découvrir, en live, un groupe assez incroyable, dont le premier Ep m'avait vraiment impressionné: les Bloodthirsty Hippies.

La soirée commence tout en douceur avec Long John Silver , duo guitare voix, folk rock, tendance cowboy du désert, plutôt bien senti. Les premiers morceaux sonnent justes, dans le genre, on sent bien l'influence Neil Young, Elliott Smith, Mark Lanegan… De jolis arrangements de guitare parsèment le tout, plutôt élégamment, mais le concept s'essouffle malheureusement assez vite. Malgré leur belle authenticité, on perçoit quelques petites faiblesses dans les voix, qui méritent, sans doute, d'être un peu plus exploitées et travaillées, ce qui est bien dommage, car leur concept est pourtant, plein de sympathiques promesses.



C'est ensuite au trio So Was The Sun d'investir la scène et c'est plutôt une bonne surprise. De bons morceaux soignés, tranchants, tantôt mélancoliques, tantôt rageurs. Le groupe repose essentiellement sur les épaules de Palem, chanteur, guitariste, sincère et habité,qui officie également au sein des Bree Van De Kamps. Avec sa voix puissante et touchante, capable, aussi bien, de tendre vers un lyrisme à fleur de peau à la Thom Yorke, que d'accès de rage punk à la Franck Black, Palem étonne. Les morceaux de So Was The Sun sont carrés, puissants, parfois bien violents. Dommage que le reste du groupe reste de marbre. Scèniquement, Palem mène la barque mais aurait bien besoin, parfois, du soutien de ses collègues rythmiques qui sont tout de même un peu mollassons.



Une atmosphère électrique surchauffée envahit le triste Gambetta dès l'entrée en scène des Bloodthirsty Hippies. Tout est là. L'attitude. Le look. Les morceaux. Complètement dans l'air du temps, mais avec trois bonnes longueurs d'avance, ces quatre hippies déjantés me laissent, une fois de plus, sans voix. Les morceaux de leur premier Ep se retrouvent transcendés, explosés. ça joue fort, vite, bien. C'est sexy, glacial, sauvage. ça fait penser à plein de trucs bien qu'on a envie de réécouter à nouveau, (Siouxsie, B 52's, New Order…), le tout, passé à la moulinette du psychédélisme électrique le plus dérangé. Le groupe mixe ses influences cultivées avec une intelligence incroyable, sans complexe, sans chichi, et avec un bon sens de la rock n' roll attitude. Les personnalités, toutes très différentes, se complètent brillamment, pour former un beau collectif de hippies assoifés de sang.
Lia, baby doll diaphane et hypnotique, délivre un chant glacial et distant très Siouxsie, avec une élégance et une classe singulière assez troublante, à mille lieux des clichés du genre. Alex triture sa guitare dans des accès de rage sauvage et sexy. Max, batteur charismatique, frappe, l'air de rien, comme un damné, le sourire aux lèvres, tandis que Man, le bassiste, se tient un peu en retrait avec une élégance distinguée. Bref, ça cartonne tant et si bien que le public leur réclame trois rappels pendant lesquels les Bloodthirsty Hippies osent même s'attaquer au classique des classiques du rock'n' roll sauvage, "I wanna be your dog" des Stooges. Exercice difficile, malgré les apparences, dont les hippies se sortent plutôt bien, en jouant à fond la carte du rock déglingué, très punk, très sanglant.

Après un show aussi réussi, j'imagine aisément que, dans une salle un poil plus accueillante, ces quatre hippies là pourraient vraiment casser la baraque et mettre la concurrence complètement K.O. Prochain concert: le 30 septembre au Klub.

















photos: Stéphane Dalle.